La double réfraction du spath d’Islande
nouvelles et autres textes inédits et retrouvés
Béatrix Beck
“– Quel est pour vous le lecteur idéal ?
– Quelqu’un qui lit ce qui est écrit, pas autre chose. Ni au-delà, ni en deçà. Quelqu’un qui n’écrit pas son nom sur l’écorce des arbres.
– Avez-vous changé de style au cours de votre vie ?
– Oui, beaucoup. Quand j’étais enfant, mon écriture était pompeuse ou archaïsante. Après, ç’a été le style qu’on appelle blanc et que j’appelle incolore. Maintenant c’est n’importe quoi pourvu que ça me plaise.”
Disparue en 2008, Béatrix Beck aurait eu 100 ans le 30 juillet 2014.
Pour fêter cet anniversaire, les éditions du Chemin de fer publient le 11 juin 2014 La double réfraction du spath d’Islande, recueil de quarante-trois nouvelles et textes autobiographiques inédits ou parus en revue, qui retrace cinquante années d’écriture et dresse en creux le portrait d’un écrivain incontournable.
Lisez les premières pages de La double réfraction du spath d’Islande
en cliquant ICI
Parution : juin 2014
ISBN : 978-2-916130-63-7
collection Micheline
Prix : 19 euros TTC
200 pages
Ouvrage publié avec le soutien du Conseil régional de Bourgogne
De Béatrix Beck, André Brincourt disait : «Ses mots ont une fraîcheur suspecte.” À la lecture de La double réfraction du spath d’Islande, on prend la mesure d’une conception sans concession de la littérature, indissociable d’une infinie liberté : “J’appelle un chat un chat et un mort un macchabée” affirme-t-elle dans l’une des nouvelles inédites du recueil, au titre qui en dit long : Les zobs secs.
De ces cinquante ans d’écriture retracés ici, on retient également la permanence des obsessions de l’auteur de Léon Morin, prêtre, de La décharge ou de L’enfant-chat : Dieu, ou plutôt son absence (“Version moderne et laïcisée de l’Écorché de Bar-le-Duc : la télécommande extérieure au poste T.V. et qui pourtant le dirige. Le silence de Dieu m’a brisé la télécommande et qu’est-ce qu’un poste T.V. sans sa télécommande ?”) ; la parole donnée à ceux qui ne l’ont pas, qu’il s’agisse d’un handicapé (“Un héros de roman, c’est qui ? / – N’importe qui. / – Sans préférence ? – Plutôt les anormaux. Il y a plus d’au-delà en eux.”), d’un chat (Ooliba et sa descendance) ou d’un crayon (“Seule la fille de trois ans est bien. J’aime tracer son nom en capitales : PULCHÉRIE. Elle ne m’utilise que pour dessiner des maisons avec leur fumée et des fleurs qui les dépassent, des chiens à six pattes, des personnes avec tous leurs doigts comme des quenelles.”).
Ce qui transparaît à chaque page : l’amour des mots et le plaisir de jouer avec eux : “Jean Ricardou a écrit dans Problèmes du Nouveau Roman que personne n’a jamais couché dans le mot lit et que le mot chien n’a jamais mordu personne. Démentiellement, l’espoir subsiste : peut-être l’écrivain finira-t-il par coucher le lecteur dans le mot lit, par le faire mordre ou lécher par le mot chien. Flaubert rêvait d’un livre à propos de rien, qui se tiendrait par la seule force interne de son style. C’est l’échec, renouvelé à chaque ouvrage, qui donne la force de continuer. ”
Dans la seconde partie, consacrée aux textes autobiographiques, le lecteur se familiarisera avec celle dont la vie et l’œuvre sont intimement liées. On y croise bien sûr la figure du père, Christian Beck, celle de Roger Nimier ou d’Aragon, mais aussi celle d’une voisine qui deviendra l’héroïne du roman Josée dite Nancy :
“J. souhaite des rapports sexuels avec moi un peu, j’imagine, comme les cannibales qui espèrent acquérir les caractéristiques de ceux qu’ils consomment. Ce serait pour elle une manière d’entrer dans le français, tandis que je me familiariserais avec la fourrure.
Moi, revêche :
– J’ai peur de ne pas avoir ces goûts-là.
Craignant d’avoir été trop blessante, j’ajoute :
– J’ai aimé des femmes, mais je ne les ai jamais touchées.
Elle, encourageante :
– Y a un commencement à tout.”
Et la lecture de La double réfraction du spath d’Islande, de donner envie de s’écrier, comme J. la voisine : “Je vous aime, mâme Beck.”
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L'auteur : Béatrix Beck
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